• Corps et âme :

    Quelle sensation de légèreté. Je me laisse transporter lentement par le courant, détendu et attentif. J'ouvre mes yeux. Je nage calmement sans bruit.

    L'air est si pur, l'eau de la rivière est fraîche et limpide. Les ombres des feuillages des arbres qui longent la berge dessinent, ça et là, des formes magiques aux mille étoiles dansantes, reflets mouvants de notre astre.

    Je suis heureux. Je savoure avec un plaisir immense ce doux moment de repos. Je suis enfin de retour dans ce cadre qui m'est familier. Evgéni a réussi, il doit savourer sa victoire, là bas, dans ce futur si lointain. Pour ma part, je me sens enfin libre.

    Le village n'est plus très loin ? J'ai déjà été acteur de cette scène, je ne me laisse donc pas surprendre par le gardien qui m'asséna un coup violent sur le crane, jadis. Je contourne avec furtivité sa présence, et m'infiltre rapidement dans la case de Zalih.

    Celui-ci s'y repose et ma présence dans sa case n'éveille en lui aucun soupçon tant son sommeil semble profond. Je l'observe, calmement et m'assoit, attendant son réveil pour lui révéler mon identité et mon retour. Je ne sais pas comment m'y prendre pour lui expliquer toute cette folle histoire  mais le sursaut de Zalih ne me laisse pas le temps d'y songer. Il saisit rapidement le poignard posé au pied de son couchage et bondit, l'arme en main, à un bon pas de moi. Il m'observe et me demande :

    -« Que fais-tu dans ma case, qui es-tu et qu'attends-tu de moi ? »

    -« Tu me connais sous un autre visage Zalih ! »

    -« Comment connais-tu mon nom ? Je ne crois t'avoir jamais vu, ton visage m'est inconnu, pourtant ton regard me parle ! »

    -« Tu me connais sous le visage de l'homme à qui tu as appris ton langage, tes mœurs et tes coutumes, l'homme de la tribu du nord ! »

    Un fois encore je suis rentré dans un monologue sans fin. Une fois encore je suis surpris par l'aptitude de Zalih à admettre cette histoire. Sa curiosité est grande. Ses questions sont nombreuses. Il adopte maintenant une attitude détendue dont la preuve se traduit par l'abandon de son arme.

    Il m'offre même une collation épicée pour soulager ma gorge et redonner de l'élan à ma voix. C'est au moment ou je trempe mes lèvres dans ce breuvage que surgit le visage de Nima à l'entrée de la case de Zalih. Elle ne semble que partiellement surprise par ma présence. J'en suis moi-même étonné. Zalih lui prit d'entrer, elle exécute sa demande avant même qu'il finisse de la lui formuler. Elle avance vers Zalih, le salue comme il se doit dans les rites de la tribu. Elle me dévisage avant de me saluer aussi. Nima scrute mes yeux et l'insistance de son regard me dérange. Si il est vrai que son visage m'est familier, le mien ne l'est pas à ses yeux.

    -« Es-tu... Es-tu celui de la tribu du nord ? »

    -« Oui ! Nima ! »

    Ma réponse ne l'étonne pas. Mais le doute persistant, elle me demande de le prouver. Je lui explique qu'il y a peu de temps, nous nagions ensemble.

    Il y a peu de temps encore, elle apprenait mon identité seconde, celle qui ne se voyait pas et qui aujourd'hui prend la forme d'un corps et d'une âme. J'explique aussi à Nima qu'elle m'a aidé pour achever mon premier voyage. Zalih, qui m'écoute avec autant d'attention que Nima, se tourne vers elle, surpris par mes dernières paroles.

    -« C'est bien lui, c'est lui j'en suis maintenant convaincue ! »

    C'est à partir de ce moment-là, que mon existence prit véritablement un sens.

    Aujourd'hui, sept saisons ont passé. Lira, magnifique enfant de six ans, fille de Nima et de moi-même, fait partie de notre quotidien. Je ne regrette absolument pas ma vie passée, fini le DiKtatÔ, exit un futur que je ne rencontrerai plus jamais.

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  • Commentaires

    1
    Lundi 31 Mars 2008 à 19:16
    Tu écris magnifiquement. J'ai l'impression que l'on me raconte une histoire plutôt que de la "lire".
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