• Faux-départ

    Faux-départ

     

    Faux-départ.


    Cela fait déjà quatre cycles que j'habite les faubourgs de la petite ville de Kwedj. J'ai appris que Jkinn ne comptait qu'une population de cinq millions d'habitants pour une planète aux dimensions de la Terre. De vocation agricole, elle fournit des denrées  alimentaires à trois colonies voisines. En échange, elles s'acquittent de leurs dettes en services rendus dans le domaine de l'énergie, de la haute technologie et de la cybernétique. Les Jkinnii cultivent un profond respect de la nature et de l'environnement. Non-violents convaincus, ils se livrent avec un naturel plaisir à toutes formes de développements artistiques. Ils n'ont néanmoins pas ôté de leurs mémoires la tragique et cauchemardesque saison durant laquelle les Xerks les avaient réduits à l'état d'esclaves. Ils ont rebâti des citées sécurisées et les moyens mis à la défense préventive sont élevés.


    Il est déjà bien tard quand le vibreur mural me sort du sommeil. Je bondis sur mes pieds les yeux encore collés par une nuit trop courte, je fonce sous la douche et hâte mes ablutions matinales.

    Je vais être en retard, le seul rendez-vous du cycle avec les colonies extérieures. J'ai choisi le bon jour pour me réveiller... en retard. Une opportunité en or pour rejoindre les miens car autant sur la surface de Jkinn les communications avec l'alliance sont plus que rares pour des raisons évidentes de sécurité, dans l'espace tout est permis ou presque et par ce biais, je devrais pouvoir contacter le quartier général pour annoncer que je suis bien en vie sur un croiseur marchand, le Varda. A peine séché, je m'habille rapidement. Tant pis pour le repas, je mangerai sur place. Je pose mon translateur derrière l'oreille, enfile mon blouson à la hâte et sors en claquant la porte de mes quartiers.


    Quartier Corsialis :

    Dehors les gens s'agitent sous un soleil qui pointe à l'horizon, dont les rayons encore rasants rallongent les ombres des silhouettes en mouvement. Je cours vers les transports rapides en partance pour l'astroport de Kwedj. Je me faufile vers l'arrière du compartiment et m'assoit entre une dame âgée qui semble absorbée par sa lecture et un homme de forte carrure qui croque goulûment dans son sandwich. La ville de Kwedj défile à grande vitesse sous mes yeux. J'aperçois déjà l'astroport et la masse énorme du croiseur marchand. La phase de décélération est entamée. Quelques secondes plus tard je traverse le hall d'embarquement du Varda et me présente devant le guichet sur le quai numéro douze.


    • - «Bonjour... je dois prendre le vol 25 sur le croiseur marchand Varda, voilà mon titre de transport.»
    • - « L'embarquement est terminé, les portes sont déjà fermées et le préchauffage des turbines a déjà commencé.»
    • - «Mais ...On ne peut vraiment rien faire?»
    • - «Hélas non!» me répond d'un air grave l'agent de l'astroport.
    • - «... je suis backfighter, Capitaine d'escouade de l'anneau... vous saisissez?»
    • - «Le président est à bord alors... un backfighter... et puis l'heure, c'est l'heure!»
    • - «Comprenez-moi!...»
    • - «Je veux bien vous comprendre, mais observez les générateurs de stase sont déjà déployés.»
    • - «...Merci beaucoup Monsieur!»

    J'ai quitté le guichet d'un pas lent, les yeux vissés au sol, dépité par la pauvreté de mes arguments miteux. Je dois attendre un cycle entier avant de réitérer cette tentative de départ. Ce n'est vraiment pas ma chance quand je décide de bouger tout me bloque ici. Je rejoins le hall de départ et observe la masse titanesque du croiseur se fondre dans un halo bleu, annonciateur d'un départ imminent. La stase étant déployée, l'énorme engin décolle avec lenteur, lourdement, avant de prendre de la vitesse. Quand le Varda ne fut plus qu'un point dans le ciel dégagé de Jkinn j'entendis alors une voix qui m'était familière.


    • - «Je te croyais parti avec le croiseur marchand, j'étais persuadé de tes intentions...!»
    • - «Leïann ! C'est à dire que ... je ne me suis pas réveillé suffisamment tôt... j'ai raté mon départ!Je vais devoir attendre encore une saison avant de pouvoir avertir les miens!»
    • - «Fox, nous touchons au but, ton ENB sera prochainement sur pieds. Tu pourrais te montrer plus patient et plus coopératif. Des hommes travaillent pour remettre en état et même améliorer ton vaisseau, après tout ce que nous avons fait pour toi et ... tu serais parti sans me dire un au revoir...»
    • - «Leïann... non, ne crois pas cela, je n'ai pas pour habitude de fuir tel un voleur, mon intention est d'avertir le contingent de Myskan de ma présence, ici, sur Jkinn, je serai rentré sur Kwedj par taxinav...»
    • - «Rentrons si tu veux bien!» me proposa-t-elle d'un timbre de voix assurément ternie par une émotion mal contenue.

    Je suis Leïann sans dire mot. Nous empruntons les transports rapides pour notre retour. Leïann ne me parle pas et se contente de regarder à l'extérieur les enseignes lumineuses de la ville défiler à grande vitesse. Nous sortons au nord-est de Kwedj. Sur le quai, elle me jette un regard rempli de tristesse et de colère. Arrivé au bout de l'avenue de la ligue de Myskan, elle m'invite par un signe de sa main à pénétrer dans le hangar du secteur. Dans le hall, à droite d'un pont de soutien se tient mon vaisseau et une dizaine de personnes qui s'activent sur le fuselage. J'aperçois également trois techno robots qui finissent l'assemblage de la nouvelle pointe avant de l'appareil.


    • - «Regarde, ils achèvent l'assemblage du bouclier générateur temporel et la mise au point des systèmes de navigation est déjà connectée à ce nouvel environnement.Tu vas pouvoir reprendre ton vaisseau rebaptisé ENB 13 car il sera le seul dans son genre. Nous avons reçu les certificats d'authentification de l'appareil. Il ne te suffira d'attendre que DEUX JOURS avant de partir pour TOUJOURS!»
    • - «Leïann, Leïann! Je ne vous aurais pas abandonné, c'est incroyable de penser cela de ma part... ne m'en veux pas!»

    Joselm vient de sortir de l'appareil et avance vers nous, un peu troublé par la scène qu'il était en train d'interrompre.


    • - «Capitaine, la mise sous tension est imminente, pouvez-vous activer la communication à l'aide de votre bracelet?»
    • - «Nous vous suivons!»

    Je saisis le bras de Leïann et nous pénétrons ensemble dans mon vaisseau. Une fois assis aux commandes, je pose mon poignet et le contact se produit entre mon bracelet et le pupitre de contrôle. L'afficheur m'indique l'habituelle demande :

     AUTHENTIFICATION VOCALE.


    • - « Capitaine Fox!»
    • - «Accordé! Mise sous tension.»

    Le panneau centrale s'illumine aussitôt ainsi que les instruments vitaux de l'appareil. Joselm et Leïann sautent de joie.


    • - «ISO, comment vas-tu?»
    • - «Très bien Capitaine et plutôt satisfaite du travail et des soins apportés par cette équipe. Je suis heureuse que vous alliez bien Capitaine!»
    • - «Joselm et Leïann ainsi que l'équipe en charge des vaisseaux de l'alliance sont les personnes qui t'ont remis sur pieds.»
    • - «Enchanté de faire votre connaissance et un grand merci, vous avez fait des miracles dans les moyens de propulsions dont je suis maintenant dotée. Vous avez également amélioré mes capacités défensives quand au moyen de navigation collapsar, vous m'apportez une autonomie que j'apprécie déjà par avance...»

    Joselm sort manifester sa joie, à haute voix, avec l'équipe de spécialistes restés à l'extérieur. Leïann reprend aussitôt :

    • - «C'est fou comme un IntelArt est capable de mettre du sentiment dans ses propos programmés mais merci beaucoup pour les compliments.»
    • - « ISO est beaucoup plus qu'un IntelArt, je dois plusieurs vies à cette entité dont les aptitudes multiples s'adaptent avec le temps au tempérament de son propriétaire. ISO est aussi munie de plusieurs modules de psychologie, c'est cet IntelArt qui m'a appris à vivre dans votre temps, à comprendre la situation et donner un sens à tout ce qui se déroule autour de moi. Je n'avais pas demandé de partir de chez moi, d'abandonner mes amis et mon chat!»

    Je vois un sourire poindre sur le visage de Leïann qui se réjouit sans pudeur de la pique lancée ainsi que de ma réaction impulsive et maladroite.


    • - «Il n'empêche que c'est une machine et moi un être humain!» me confit-elle avant de me saisir les épaules et de me donner un franc baiser sur chacune de mes joues.
    • - «Allez l'essayer et profiter de votre sortie pour avertir votre escouade et ... revenez Capitaine Fox!»
    • - «Merci pour tout» lui dis-je en lui rendant les baisers qu'elle m'avait donné. Je regarde s'éloigner Leïann qui se retourne sur le seuil de la porte du vaisseau. Son sourire ainsi que ses yeux pétillants me font plaisir, je lui lance un signe de ma main.


    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    1
    yetirel
    Vendredi 28 Novembre 2008 à 20:20
    moralité: rien ne vaut un bon et solide réveil-matin, même si l'engin date de quelque année-lumière moi je vous dit
    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    2
    Samedi 6 Décembre 2008 à 08:29
    Enfin j'ai  lu la suite des aventures du capitaine Fox.
    Que va t-il lui arriver maintenant?
    A quand la suite?
    Gros bisous
    3
    Lundi 15 Décembre 2008 à 11:03
    tu as une énergie à rêve assez impressionnante ! Et une manière de raconter cela qui vaut le détour :-)
    Tu disais que cette aventure, ce rêve récurrent, t'avait laissé un goût amer...pourquoi ?  Parce que ce n'était malheureusement qu'un rêve ?
    Bises d'amitié à toi. 
    4
    Lundi 15 Décembre 2008 à 21:26
    ... Tu as bien raison Frederianne, quand le rêve est très fort et qu'il se conjugue avec une réelle passion que j'ai pour le fantastique, la réalité me laisse une drôle de saveur en bouche !!
    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :