• Kouros

    Kouros

     

    Base militaire d'entraînement de Kouros d'Altaïra.

    Quartier général, secteur des simulateurs de combat.


    Je viens tout juste de sortir d'un exercice crucial de ma formation, celui d'une attaque coordonnée dans laquelle pas moins de 150 simulateurs ont participé, simultanément. Cette simulation a été une brillante victoire pour notre groupe, virtuelle certes, mais une victoire tout de même contre cinq croiseurs Xerks.

    Nous avons réussi le test ultime avant de connaître le baptême du feu. Si tout se passe bien nous partirons rejoindre les rangs des marches du bras de  Persée qui attendent un renfort dont nous ferons partie. Le but de cet effort est de couper les territoires occupés par les Xerks en deux parties distinctes avant de lancer des vagues d'attentats par nos agents infiltrés dans l'espace occupé et de lancer le reste de notre armada dans une attaque lourde pour déloger l'ennemi, l'affaiblir, le plier jusqu'à lui faire signer un traité de paix inaliénable. La reddition nécessaire des Xerks ou leur destruction.


    Comme vous pouvez le constater, j'ai bien appris mes leçons et il n'aura fallu que six décades,  soit trois bons mois terrestres pour parfaire ma formation psychologique, apprendre les règles de pilotage manuel, se familiariser aux tactiques complexes de combat, à utiliser aussi l'arsenal militaire dont mon vaisseau dispose, torpilles protoniques, sondes à éléments instables, plasma à hyperespace. J'ai également appris à voyager par saut collapsar, à utiliser des trous de vers artificiels pour bondir dans l'espace d'un bout à l'autre de la galaxie. J'ai passé des épreuves longues et périlleuses, des batteries de tests aussi. Aujourd'hui et ce depuis deux décades j'ai rejoint les rangs du bataillon Alpha qui déroulera son attaque programmée en amont des rangs des marches de Persée.


    Je suis excité à l'idée d'apporter ma contribution contre cet envahisseur sans foi ni loi et pouvoir ainsi faire en sorte que la paix règne enfin dans toute la galaxie. Excité mais fatigué.


    Je marche, les yeux dans le plateau que je tiens et avance vers une grande table du mess des officiers. Des pilotes mangent par petits groupes épars et je décide de m'installer au bout d'une table, recherchant un peu d'isolement dans cette grande salle. Je bois un grand verre d'eau avant de lever le nez vers l'étendue de cette immense cantine. Le plafond est très haut, très lumineux aussi. Derrière ce dôme éclatant, les vaisseaux des forces de l'union libre du grand anneau décollent et se posent donnant une impression d'un étrange ballet d'insectes géants. Les formes et les tailles sont variables mais le symbole de l'anneau est présent sur les flancs de chaque appareil.


    J'avale mon repas en fixant machinalement un immense écran qui distille les nouvelles des quatre coins de la galaxie entière :

    • coup d'état manqué des factions rebelles de Cassiopée, arrestation des généraux renégats.

    • Consolidation du traité d'échange de denrées alimentaires dans l'union libre, entraide aux planètes lointaines des marches du bras nord de la galaxie.

    • Arrivée sur l'anneau de hauts dignitaires de Fomalhaut pour porter main forte à l'union libre contre son ennemi cruel et tant dévastateur.

    • Un croiseur Xerks s'écrase accidentellement sur le troisième satellite de Ionyss. Une escouade de 150 vaisseaux de combat de l'anneau se rend sur place pour découvrir le vaisseau abîmé. Tous les occupants du croiseur sont morts. J'apprends que ce type d'accident n'est pas rare chez l'ennemi qui ne dispose pas de moyens de navigation aussi sophistiqués que les nôtres.

    • Concert immense du fameux groupe de métal positif «Titanium» sur la lune d'Om. On attend environ douze millions de spectateurs pour cette ultime tournée de cette formation mythique.

    • Arrivée des premiers secours après l'explosion ravageuse de l'usine d'antimatière des lunes d'Algol, on déplore cinq mille victimes d'après les spécialistes. Deux bâtiments de l'anneau sont sur place et évacuent l'ensemble de la population ainsi que les rares rescapés.

    • Libération conditionnelle de tous les éléments de la secte de la main verte.

    • Mode: Nouvelle tendance chic pour la décade avenir.

    • Le haut commissaire de l'anneau débloque une sommes de 125000 milliard de credos pour développer l'utilisation de l'antimatière comme énergie propre sur les planètes minières de Galax et Phorbès....

    Toutes ces nouvelles me saoulent et ajoutent à ma fatigue une certaine morosité. Le contenu des médias ne change pas, toujours aussi porteurs de spectaculaire de dramatique et de tape à l'œil. Les milliers d'années qui séparent mon époque actuelle de celle de mes origines me démontrent que rien n'évolue bien vite chez l'homme et ses descendants.

    J'ai hâte de rejoindre mes quartiers, je pose mon plateau et sors dans le grand hall, je me dirige vers l'ascenseur qui m'amène au douzième sous-sol. Une fois sorti, je me rends vers le hangar S332. Je croise un petit groupe de mécanos qui s'affairent autour d'un robot de maintenance paradoxalement en panne. 


    Au bout du hangar, je débouche sur une allée d'alvéoles hexagonales qui s'emboîtent à perte de vue lui donnant l'aspect d'une ruche titanesque. J'avance d'un pas lent vers la troisième série. Arrivé au seuil de porte de mon compartiment, j'applique mon bracelet sur l'identificateur qui s'illumine. Au même moment se sas s'ouvre et se referme à mon passage et pénètre dans mes quartiers. Devant moi, l'imposant E NB 12 est toujours à sa place. Je pénètre dans mon vaisseau et emprunte le couloir qui aboutit au poste de pilotage.


    - « Bonsoir Capitaine Fox ! »

    - «  Bonsoir ISO, nous sortons, prépare un décollage immédiat, j'ai besoin de m'isoler un peu. »

    - « Très bien Capitaine, déverrouillage du vaisseau, ouverture du panneau de sortie, passage du portail de sécurité, où allons-nous Capitaine ? »

    - « Je ne sais pas ISO, je suis si fatigué... j'ai entendu dire par des officiers qu'il y a une plage magnifique au nord-ouest de la base, je veux m'y reposer une heure ou deux. »

    - «  Toute votre prose manque un peu de netteté mais soit... cap au nord-ouest. »


     Une végétation touffue défile sous l'ENB 12 qui fonce à vive allure vers sa destination imprécise. Je vois déjà se dessiner les contours de la côte qui sépare le bout de ce continent de l'immense et unique océan d'Altaïra. Sous les rayons rougeâtres d'un couché de la magnifique Altaïr, devant l'horizon  plat de l'océan, j'active le pilotage manuel et entreprends un descente vers une immense plage de sable de couleur ocre. Je pose l'ENB 12 en douceur dans un nuage de poussière. Une fois dehors, je cours en direction des vagues qui explosent en roulant dans un énorme fracas sonore. Je me jette à terre, épuisé, jouissant simplement de la douce brise qui caresse ma peau, mon corps est étendu sur le tapis de sable chaud, mon front repose sur le sol. Les yeux clos, j'écoute déferler les ondes de l'océan.


    Je pleure, je songe à mes enfants, nostalgique. Je ne sais pas pourquoi et comment j'ai pu accepter cette situation insensée, abandonner mes enfants, pour aller rejoindre une cause démente, aller faire la guerre à des inconnus aux confins de la galaxie, baigné dans un lointain futur. La voix d'ISO me sort de cette torpeur et résonne soudain dans mon micro-casque :


    - « Tout se passe bien Capitaine, ne vous laissez pas submerger par la tristesse, vos enfants apprécient votre double. »

    - « Tu ne peux pas comprendre ISO, j'ai besoin de voir mes enfants, c'est vital ! »

    - «  Vous les verrez Capitaine, plus vite que vous ne pouvez l'espérer ! »


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