Blog de l'inutile et du savoir incertain
ACTE 11 : L'envol.
Lôr de ReN gisait à terre entourée de sa garde et des technomédics qui la réanimaient. Comme le rite le demandait, son corps fut mené de la salle de transe dans le quartier de commandement.
Elle ouvrit les yeux.
La lumière était trop intense et transperçait son crâne d'une douleur extrême, froide, mortelle.
Ses pupilles dilatées rétrécirent par pur réflexe.
Des larmes naissantes aux commissures de ses yeux coulaient sur ses tempes pâles et se cachaient dans sa chevelure.
Sa bouche eut un rictus de douleur, s'entrouvrit et laissa échapper un long cri rauque qui sortait du plus profond de son être. Les technomédics s'agitaient autour d'elle.
Le prince de Tolô, précédé par le général Fen, venait d'entrer dans la salle de contrôle. Derrière eux deux guérisseurs vinrent rejoindre le groupe qui s'affairaient autour du corps étendu à terre.
L'instant d'après, deux lourds impacts vinrent rompre le silence qui régnait. Le visage sombre de Tolô se leva instinctivement vers le ciel.
Le corps de Lôr tremblait en s'arque boutant par des spasmes. Sa respiration était rapide, le rythme de son pouls était faible. Guérisseurs et technomédics s'acharnaient pour l'arracher de la torpeur qui semblait vouloir la submerger. Le visage blême, elle se crispa encore. Un cri chargé d'angoisse mêlé de haine sorti de sa bouche.
Dehors le ciel s'assombrit. Le vent du sud se levait sur cette bataille titanesque. Le vaisseau Falien se préparait à frapper encore ReN. Un éclair orange jaillit de sa poupe, suivi du tonnerre provoqué par une salve destructrice qui vint percuter l'enceinte d'acier de la cité de ReN. Les fondations tremblaient sous la secousse provoquée par les armes Faliennes.
Une fois de plus, elle éructa une émouvante complainte, incompréhensible, qui se termina par un cri de désespoir. Le son de sa voix résonnait dans la salle de contrôle. Une nouvelle percussion protonique vint encore ébranler la cité entière et semblait faire écho aux hurlements de la régente. Sous ce choc puissant, Tolô mit genou à terre et dévisageait Lôr.
Au même moment, le pupitre de commande de la salle de contrôle s'illumina. Instantanément, la totalité de la toute puissante cité de ReN baigna dans un nuage de stase reconnaissable par sa couleur bleue. Le sol de l'ensemble de la citadelle s'agita de vibrations qui faisait penser à une secousse tellurique. Lôr se releva doucement et congédia de sa main la garde, les technomédics et guérisseurs qui l'avaient assisté.
A l'extérieur, le vaisseau Falien déversa une vague meurtrière vers la cité. Cette fois, les salves de torpilles vinrent iriser la surface du dôme de la Citadelle sans occasionner de dégâts. La stase assurait maintenant une protection efficace contre toutes les armes baryoniques.
Lôr se tenait à présent devant le pupitre de contrôle. Le général Fen l'avait rejoint et observait dehors les tirs devenus inutiles du croiseur Falien. Le prince de Tolô, quant à lui, se tenait légèrement en retrait. Son visage si sévère laissait apparaître un soupçon d'optimisme non dissimulé.
La tablette centrale dégagea un halo laiteux. Des filaments vaporeux s'échappaient en de multiples torsades du panneau de commande. Trois longs cristaux colorés apparurent, tous les trois reposaient alignés en position verticale.
Le premier, de couleur rouge, était de forme pyramidale et sa base triangulaire.
Le second, de couleur verte, était un cylindre parfait.
Le troisième cristal aux reflets violets était un cube.
Lôr saisit sans hésiter la pyramide rouge et la logea sur un socle dont l'empreinte épousait la base du cristal. Celui-ci s'illumina sans tarder et laissa échapper une fréquence sonore extrêmement basse, à peine audible. Aussitôt la cité trembla lourdement.
Lôr positionna sa main au dessus du cristal et leva ses doigts fins à la verticale. De sourds vrombissements annoncèrent les secousses intenses qui résonnaient dans toute l'imposante structure de la cité.
De plus profond des fondations de la citadelle naquirent de puissantes oscillations mécaniques. A l'extérieur, le sol qui jouxtait l'énorme muraille métallique, se fissura puis éclata en de milliers de crevasses qui ne cessaient de se multiplier. La terre semblait s'effondrer autour de la cité. Une intense fumée mêlé de fines poussières formait une bulle étrange qui englobait presque la cime du dôme de la mégapole.
De chaque pilier du rempart, le feu jaillit, puis un magma aveuglant remonta des entrailles de la terre pour se déverser dans ce dédale de failles.
L'énorme masse de la cité de ReN se souleva lentement, s'arrachant de son socle titanesque. Des blocs rocheux glissaient le long de la coque et finissaient par choir lourdement dans le cratère en fusion. Petit à petit, nous prîmes de l'altitude pour laisser en bas une empreinte chaotique à l'allure d'un volcan en irruption.
Le vaisseau de Fal eut à peine de temps de s'écarter de la trajectoire de l'imposante citadelle qui prenait assurément plus de vitesse. Il ne suffit que d'une poignée de secondes pour que le ciel au delà du dôme s'assombrisse, devenant noir, ne laissant apparaître que les étoiles scintillantes du firmament comme seul tableau.
La régente pivota avec calme et assurance et saisit, d'un geste rempli de délicatesse, le cylindre vert et le mit en place sur son socle. Aussitôt le cristal émit une lueur suivi d'une fréquence sonore agréable, étrangement apaisante. Tolô observait la scène, perdu dans ses pensées. Son visage laissait apparaître un air interrogateur.
Ses nombreuses questions cessèrent quand la maîtresse de la cité reprit :
Elle leva la main au dessus du cristal vert. Le cylindre s'illumina dans un halo laiteux qui s'intensifia. De son index tendu, elle décrivit de multiples cercles autour de l'objet qui semblait s'animer et laissait échapper d'étranges vibrations sonores, puis sa main se ferma, son poing se serra pour s'ouvrir à nouveau. Ses cinq doigts tendus visaient un point extérieur. Dehors, un énorme vortex vert apparut dans le vide sidéral, contrastant avec la noirceur de l'espace. Un signe qui désignait notre cible, un trou de ver venait de se former. La cité allait être engloutie dans un saut collapsar qui devait la mener très loin, à l'origine de tous les maux et les nuisances qui menaçaient la stabilité toute relative de nos contrées.
Le vaisseau-citadelle de ReN s'engouffra lentement dans le cœurs de cet artéfact. Le croiseur Falien accéléra sa marche et pénétra également dans le vortex avant qu'il ne se referme.
Tolô semblait irrité par l'assurance de Lôr. Elle quitta le regard de Fen pour se tourner vers le Prince, son visage s'assombrit et sa voix se fit dure.
Un bruit sourd résonnait dans toute la cité de ReN.
Une sirène hurla.
INTRUSION PORTE NORD
INTRUSION PORTE OUEST
EXPLOSION DANS LE QUARTIER DES GENERATEURS DE STASE !
INTRUSION PAR TELEPORTATION RAPIDE.
VEROUILLAGE DES PORTES ... ACTIF.
Une sentinelle entra hâtivement dans la salle de commande, l'homme semblait avoir une mauvaise nouvelle à partager.
Dans le long couloir qui mène à la salle de commandement cinq hommes vêtus de noir, sabre en main, se déplaçaient furtivement. Ils étaient suivis par un être dont le corps était drapé d'une longue et ample toge. Une capuche masquait entièrement son visage.
Akianna était dans le vaisseau anderrien.
Un vent de panique anima la salle de commandement quand ce groupe armé fit son entrée, silencieusement. La sentinelle n'eut pas de temps de dégainer sa dague quand il reçut un violent coup de sabre sur le flanc qui le terrassa aussitôt. Un des gardes asséna un coup de coude sur le visage du général avant même qu'il ne puisse atteindre le panneau de contrôle d'où il pouvait lancer un CALL PANIK. Fen tomba à genoux avant de s'effondrer au sol, face contre terre.
Ce furent les dernières paroles qu'Akianna prononça alors que le baron de Grom et trois de ses valeureux arbalétriers firent irruption dans la salle de commandement. Trois carreaux fusèrent alors que le baron embrochaient tour à tour ce qu'il restait de ce commando Falien. Akianna émit un raclement de gorge, tétanisée par la rapidité de cet assaut et surprise de ne rien avoir perçu, malgré ses pouvoirs. Elle ferma sa main sur le cube avant de le plonger hâtivement dans une poche de son ample toge, son autre main avait saisi son collier téléporteur. Le prince de Tolô dégaina son épée et avança, arme au poing, vers cet être étrange qui s'était emparé du troisième cristal. Lôr retint le bras armé du prince mais ne put empêcher celui du baron de frapper. Akianna, blessée à l'épaule, trouva la force d'actionner son téléporteur. Elle disparut dans un éclair rouge vif.