• Energie sombre

     

    Une nouvelle lumière sur l'énergie sombre

    L'accélération de l'expansion de l'Univers est un phénomène pour l'instant inexpliqué. Ce mystère pourrait être levé grâce à une nouvelle méthode mise au point par une équipe internationale de chercheurs, dont plusieurs appartiennent à des laboratoires associés au CNRS(1). Pour cela, les scientifiques ont, pour la première fois, mesuré la position et la vitesse de plus de 10 000 galaxies dans l'Univers lointain(2). Cette campagne d'observation a été menée via l'instrument VIMOS(3), dont le responsable est Olivier Le Fèvre, directeur du Laboratoire d'astrophysique de Marseille (LAM, CNRS / Université de Provence / Observatoire astronomique Marseille Provence). Non seulement cette méthode inédite apporte des informations précieuses sur la nature de l'énergie noire, mais elle ouvre aussi de nouvelles perspectives sur l'identification de l'origine de l'accélération cosmique. Elle fait l'objet d'une publication dans Nature le 31 janvier.

    L'expansion de l'Univers est actuellement plus rapide qu'elle ne l'était par le passé. Mais, cette accélération ne peut s'expliquer avec les lois fondamentales de la physique sans émettre de nouvelles hypothèses. Parmi les plus probables, deux sont aujourd'hui particulièrement étudiées, à savoir :

    - soit l'Univers est rempli d'une mystérieuse énergie sombre produisant une force répulsive qui contrebalance le freinage gravitationnel produit par la matière contenue dans l'Univers ;

    - soit la théorie de la gravitation n'est pas correcte et doit être modifiée, en ajoutant par exemple des dimensions supplémentaires à la description de l'espace.

    Or, les observations actuelles du taux d'expansion de l'Univers ne permettent pas de trancher entre ces deux options.

    Une collaboration internationale, composée de 51 scientifiques répartis dans 24 institutions, a découvert une nouvelle méthode qui pourrait aider à résoudre ce problème. « Nous avons montré que les sondages qui mesurent les positions et les vitesses des galaxies distantes offrent une nouvelle approche pour percer ce mystère. » déclare Luigi Guzzo, coordinateur de l'étude.

    Sonder des galaxies il y a 7 milliards d'années, une première

    La technique est basée sur un phénomène bien connu : le déplacement des galaxies résulte de la somme de l'expansion globale de l'Univers (qui éloigne les galaxies les unes des autres), et des effets dus à la matière présente dans l'environnement local. « À partir des vitesses d'un grand échantillon de galaxies, observées 7 milliards d'années dans le passé, nous avons reconstitué la structure en trois dimensions d'un volume important de l'Univers lointain et ainsi observé la distribution des galaxies dans l'espace 3D(4) » indique Olivier Le Fèvre, l'un des co-auteurs de l'article et responsable de l'instrument VIMOS(5), avant de préciser que « les vitesses contiennent également une information sur le déplacement relatif local des galaxies. Ce dernier introduit des distorsions, petites mais mesurables, par rapport à leur déplacement global. La mesure de ces distorsions est une façon de tester la nature de l'énergie sombre. » Ce sont donc ces différences qui dévoilent aux chercheurs des informations sur les composants de l'énergie noire.

    Besoin de 70% d'énergie noire pour modéliser l'Univers

    Les mesures obtenues soulignent la nécessité d'ajouter un ingrédient supplémentaire d'énergie dans la "soupe cosmique" à partir de laquelle l'ensemble de notre Univers a évolué au cours du temps. Cette conclusion renforce l'hypothèse émise ces dix dernières années, selon laquelle il serait nécessaire de prendre en compte, dans les modèles, une forme simple d'énergie sombre identifiée à la constante cosmologique, introduite par Albert Einstein. Avec cette nouvelle méthode, les scientifiques parviennent au même chiffre que les études précédentes, indiquant que l'énergie sombre compose 70% de l'Univers.

    Ces mesures n'auraient pu être possibles sans le concours du spectrographe VIMOS installé sur Melipal(6), l'un des quatre télescopes du VLT de l'ESO. Elles s'inscrivent dans le cadre du sondage VIMOS VLT Deep Survey (VVDS). Le VVDS, dont Olivier Le Fèvre est le responsable scientifique, a permis d'observer le spectre de plus de 10 000 galaxies dans un champ de 4 degrés carrés (20 fois la taille de la pleine Lune), remontant à des époques allant jusqu'à plus de la moitié de l'âge de l'Univers (soit environ 7 milliards d'années dans le passé).

    Enfin, les simulations effectuées à partir des données VVDS mettent en évidence que la technique que les chercheurs ont utilisée, appliquée à des sondages explorant des volumes dix fois supérieurs à celui couvert par le VVDS, pourra permettre de déterminer efficacement l'origine de l'accélération cosmique : provient-elle d'une forme d'énergie sombre d'origine exotique ? ou, une modification des lois de la gravitation est-elle nécessaire ?. Les résultats encouragent donc les chercheurs à poursuivre l'exploration de l'Univers par des sondages encore plus ambitieux.

    Références :

    A test of the nature of cosmic acceleration using galaxy redshift distortions. L. Guzzo et al., Nature, 31 January 2008.



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  • Vieux Quasar

     

    Détection du quasar le plus lointain grâce au télescope Canada-France-Hawaii

    Un quasar à 13 milliards d'années-lumière de nous, tel est le trou noir le plus lointain qui vient d'être découvert grâce au télescope Canada-France-Hawaii(1). C'est une équipe internationale menée par Chris Willott de l'Université d'Ottawa et comprenant, notamment, des chercheurs de l'Institut d'Astrophysique de Paris et du Laboratoire d'AstrOphysique de Grenoble (unités mixtes de recherche du CNRS et des Universités Pierre et Marie Curie et Joseph Fourier)(2) qui a détecté ce quasar, mais aussi 3 autres quasars très lointains. La découverte d'un objet aussi lointain alors que l'Univers avait moins d'un milliard d'années permet d'obtenir des informations sur l'importante phase de l'histoire de l'Univers où les galaxies, étoiles et trous noirs ont commencé à se former très rapidement Ce résultat est présenté, le 7 juin, par Chris Willott dans le cadre de la conférence annuelle de la Société Canadienne d'Astronomie (CASCA 2007) à Kingston, Ontario.


    Ces quasars sont en fait des galaxies qui possèdent un trou noir super-massif en leur centre. La matière entourant le trou noir est attirée et en tombant au centre s'échauffe et devient extrêmement lumineuse, d'où la possibilité d'observer des objets aussi lointains.



    Le quasar le plus lointain, jamais observé, a été nommé CFHQS J2329-0301 d'après sa position dans le ciel (il se trouve dans la constellation des Poissons). L'équipe, conduite par Chris Willott, a utilisé le télescope de 8 m Gemini-Sud au Chili pour obtenir un spectre de ce quasar. Il a un décalage spectral de 6,43 (le précédent record était de 6.42 !) et Chris Willot a pu dire : "dès que j'ai vu le spectre avec sa prodigieuse raie d'émission, j'ai su que nous tenions un quasar particulièrement lointain". La lumière de ce quasar a mis près de 13 milliards d'années pour nous parvenir. Comme le Big Bang s'est produit il y a 13,7 milliards d'années, ceci signifie que nous voyons le quasar tel qu'il était moins d'un milliard d'années après le Big Bang.

    L'intérêt de cette découverte réside dans le fait que plus le quasar est éloigné de la Terre, plus il est près du début de l'Univers. Durant les premières centaines de millions d'années l'Univers était obscur parce qu'il n'y avait ni étoiles ni galaxies, et les atomes étaient alors tous neutres. Puis les premières étoiles et galaxies ont commencé à briller et leur lumière a causé un processus connu sous le nom de ré-ionisation de l'Univers, où tous les atomes ont été ionisés. La quête des informations permettant de caractériser ce processus et son époque précise est aujourd'hui l'un des objectifs majeurs de l'astronomie. Comme le quasar est très brillant, sa lumière peut être utilisée comme source d'arrière-plan pour sonder les propriétés du gaz qui se situe entre lui et nous à cette époque de ré-ionisation.


    On pense que le trou noir au sein de ce quasar a une masse d'environ 500 millions de fois la masse du Soleil. Alain Omont de l'Institut d'Astrophysique de Paris (CNRS et Université Pierre et Marie Curie), membre de l'équipe fait remarquer que, "outre l'utilisation de la douzaine de quasars de ce type connus pour étudier la ré-ionisation de l'Univers, ils permettent aussi de repérer certaines des premières galaxies massives à s'être formées dans l'Univers".  "Nous aimerions savoir dans quels types de galaxies vivent ces quasars", ajoute-t-il.


    Références :

    Article soumis pour publication dans Astronomical Journal.
    " FOUR QUASARS ABOVE REDSHIFT 6 DISCOVERED BY THE CANADA-FRANCE HIGH-Z QUASAR SURVEY ". Chris J. Willott, Philippe Delorme, Alain Omont, Jacqueline Bergeron, Xavier Delfosse, Thierry Forveille, Loic Albert, Céline Reyle, Gary J. Hill, Michael Gully-Santiago, Phillip Vinten, David Crampton, John B. Hutchings, David Schade, Luc Simard, Marcin Sawicki, Alexandre Beelen et Pierre Cox.



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  • Altaïra : Revoir les étoiles

    Bannière de Altaïra dans le dernier chapitre de Revoir les étoiles.

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  • Les nombres et l'espace

     

    L'intuition du nombre et de l'espace chez les indiens d'Amazonie

    Est-il possible de calculer sans disposer de système de comptage pour désigner les nombres ? Pour répondre à cette question, une équipe de chercheurs du CEA, du CNRS et de l'Inserm, coordonnée par Stanislas Dehaene, Directeur de l'Unité mixte Inserm-CEA Neuroimagerie cognitive, s'intéresse, depuis 2002, aux Mundurucus, des indiens d'Amazonie vivant dans des villages isolés de la civilisation occidentale et possédant un lexique numérique restreint. Utilisant des méthodes de psychologie cognitive, les chercheurs viennent de mettre en évidence que ce peuple possède un sens intuitif des relations nombre-espace. En revanche, le sens de la mesure(1) est acquis par l'apprentissage. Publiés dans la revue Science, le 30 mai dernier, ces résultats déterminent ce qui relève de l'apprentissage ou de l'intuitif en mathématiques. Surtout, ils soulèvent l'importance d'adapter les méthodes d'apprentissage dans ce domaine.


    Ces résultats font suite à des premières conclusions obtenues en 2004 : bien que les Mundurucus ne possèdent pas ou peu de mots pour exprimer les nombres, et pas de système de comptage, ils sont capables d'additionner, de soustraire et d'approximer les nombres. Aujourd'hui, les chercheurs mettent en évidence que ce sens du nombre s'accompagne d'une intuition de leur organisation dans l'espace.

    De nombreux travaux réalisés chez des adultes occidentaux, montraient déjà que le simple fait de penser à un nombre ou d'effectuer un calcul évoque automatiquement un biais spatial(2). Ce phénomène trouve son origine dans les liens qu'entretiennent les représentations numériques et spatiales au niveau du lobe pariétal situé dans la partie supérieure du cerveau, ce que l'on observe par imagerie.

    Ces nouveaux résultats soulignent que ces associations nombre-espace préexistent à toute éducation en mathématiques. Si on présente aux Mundurucus (graphique 1) une droite étiquetée à gauche par une représentation du nombre 1 et à droite par une représentation du nombre 10 (des points dans des cercles en l'occurrence) et qu'on leur demande de positionner sur cette droite, à l'aide d'un curseur, le nombre 2, ils le situeront du côté du 1 ; un nombre supérieur à 5 sera situé du côté du 10.

    Par ailleurs, les Mundurucus organisent les nombres dans l'espace suivant une échelle logarithmique. Lorsqu'on leur demande de situer le nombre 5, ils le placent à proximité de 10. C'est plutôt 3 ou 4 qui, selon leur intuition, se situerait au milieu de 1 et de 10. En revanche, les adultes occidentaux ont une représentation linéaire des nombres dans l'espace. Ces résultats signifient que le sens de la mesure s'apprend. D'ailleurs, les chercheurs ont précédemment observé que l'enfant occidental passe d'une représentation logarithmique à une représentation linéaire du nombre entre 6 et 10 ans.  Cette recherche met en valeur le rôle essentiel de l'éducation dans le développement mathématique : en son absence, nous ignorerions même qu'il existe un espacement constant entre les nombres 1, 2, 3, 4...


    Références :

    S. Dehaene, V.Izard, E. Spelke, P. Pica (2008). Log or linear ? Distinct Intuitions of the Number Scale in Western and Amazonian Indigene Cultures. Science, in press

    Référence des équipes de recherche :
    CEA /Saclay - Institut d'imagerie biomédicale (I²BM) - NeuroSpin
    CNRS / Université Paris 8 - UMR « Structure formelle du langage : typologie et acquisition métrique et poétique », Saint-Denis




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  • Trois nouvelles planètes

     

    Découverte de trois nouvelles exoplanètes

    Trois nouvelles exoplanètes de 10, 12 et 18 fois la masse de la Terre ont été découvertes par une équipe européenne d'astronomes(1), comprenant des chercheurs du CNRS. Ces planètes tournent autour d'une étoile à peine moins massive que notre Soleil et située dans la constellation de la Poupe à environ 40 années-lumière de notre système solaire. Les modèles de formation et d'évolution planétaire indiquent que les 2 planètes intérieures doivent être rocheuses et que la planète extérieure doit avoir une enveloppe gazeuse surmontant un noyau de roches et de glace. Cette dernière est située dans la zone « habitable », c'est-à-dire à une distance de son étoile où l'eau liquide pourrait être présente. Ces résultats sont publiés dans la revue Nature du 18 mai 2006.


    Au cours des onze dernières années, 180 planètes ont été détectées autour d'étoiles similaires à notre Soleil. Les plus petites d'entre elles ont des masses comprises entre 5 et 20 fois celle de la Terre et sont pour la plupart très proches de leur étoile avec des périodes orbitales de seulement quelques jours.

    Le résultat, obtenu par l'équipe européenne d'astronomes, décrit un nouveau système planétaire aux caractéristiques se rapprochant de celles de notre système solaire. En utilisant le spectrographe HARPS installé au foyer du télescope de l'ESO à La Silla au Chili, les chercheurs ont découvert que 3 planètes de 10, 12 et 18 fois la masse de la Terre tournaient autour de l'étoile HD69830 à peine moins massive que notre Soleil et ayant un âge compris entre 4 et 10 milliards d'années. Des simulations montrent que ces trois planètes, situées à 0,07, 0,18 et 0,63 UA(2) de leur étoile, sont dans une configuration stable. D'autres simulations basées sur des modèles de formation planétaire ont établi que la planète interne devait être essentiellement rocheuse, la seconde moitié rocheuse moitié gazeuse et que la plus extérieure devait avoir une enveloppe gazeuse surmontant un noyau de roches et de glace. Cette dernière s'avère être située dans la zone habitable, c'est à dire à une distance de son étoile où l'eau liquide peut être présente à la surface des planètes solides.

    Ce système planétaire appelé aussi « Trident de Neptune » offre par ailleurs une particularité : le satellite Spitzer de la Nasa a révélé une forte émission infra-rouge, attribuée à un anneau d'astéroïdes situé entre la deuxième et la troisième exoplanète, qui connaîtrait de nombreuses collisions formant ainsi des petits grains de silicates cristallins d'un diamètre de l'ordre du micron. Ce résultat indique que le système est en évolution.

    L'étude des planètes extra-solaires est devenue un des domaines prioritaires de l'astronomie actuelle tant au sol que dans l'espace, avec comme finalité la compréhension de l'origine du système solaire, de la Terre en particulier et à plus long terme la recherche de la vie ailleurs dans le Cosmos.


    Références :

    « An extrasolar planetary system with three Neptune-Mass Planets », Lovis, C., Mayor, M., Pepe, F., Alibert, Y., Benz, W. Bouchy, F., Correia, A.C.M., Laskar, J., Mordasini, C., Queloz, D., Santos, N.C., Udry, S., Bertaux, J.-L., Sivan, J.-P. Nature, 18 mai 2006.


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